Chuck Berry : le duckwalk du Rock n’ roll


Charles Edward Anderson Berry est décédé le 18 mars, à l’âge de 90 ans. Vive Chuck Berry. Né à Saint-Louis dans le Missouri  le 18 octobre 1926, Chuck Berry est l’un des pionniers du rock‘n’roll.

Maybellene (1955), Roll Over Beethoven ‘1956), Rock and Roll Music (1957) et Johnny B. Goode (1958) ont résonné dans toutes les surprises parties.  Ses chansons sont de véritables petites histoires construites autour d’un riff de guitare.  Son attitude sur scène influence également de nombreux guitaristes (Rolling Stones, AC DC). Il est notamment l’inventeur du duckwalk, un mouvement qui s’effectue avec les genoux pliés, parfois avec une jambe en l’air.

Quatrième d’une famille de six enfants, son père est un petit entrepreneur qui travaille également comme diacre dans une église baptiste du quartier, tandis que sa mère est institutrice. La famille Berry vit dans un quartier afro-américain prospère du nord de Saint-Louis. Charles Berry s’intéresse dès son plus jeune âge à la musique. Il découvre la musique dans l’église locale où il se rend régulièrement avec ses six frères et sœurs. Parallèlement, il apprend la basse et la guitare.

Entre musique et maison de correction

En 1944, alors qu’il est en première au lycée, Berry est arrêté par la police pour avoir braqué trois magasins de Kansas City avant de voler une voiture. Il est condamné et envoyé à la Intermediate Reformatory for Young Men, une maison de correction située à Algoa, près de Jefferson City. Durant son séjour, il s’adonne à la boxe et participe à un groupe de chant. Il en ressort le jour de son vingt-et-unième anniversaire, en 1947.

Charles Berry se marie le 28 octobre 1948 avec Themetta Suggs, dite « Toddy ». Leur fille, Darlin Ingrid Berry, naît en 1950. Pour subvenir aux besoins de sa famille, Berry exerce plusieurs métiers  à Saint-Louis : ouvrier dans une usine Chevrolet et concierge de l’immeuble. Il suit brièvement des cours pour devenir esthéticien au Poro College of Cosmetology fondé par Annie Malone. Sa situation financière est suffisamment bonne pour lui permettre d’acheter une petite maison sur Whittier Street en 1950.

Country, Blues & Rock n’ roll

Afin d’arrondir ses fins de mois, Berry joue dans les bars et les boîtes de nuit de Saint-Louis avec des groupes locaux. Il joue du blues depuis qu’il est adolescent, empruntant les riffs et l’attitude de T-Bone Walker. Son style de guitare est également influencé par son ami Ira Harris, qui lui donne des leçons. Il se produit avec le trio du pianiste Johnnie Johnson à partir de 1953. Le trio joue principalement du blues et des ballades, mais Berry décide d’intégrer des chansons de country à leur répertoire. Ce genre, particulièrement populaire chez les blancs de la région, suscite d’abord la surprise dans leur public en majorité noir, mais il attire peu à peu un public plus diversifié.

Chuck Berry se rend à Chicago en mai 1955. Il y fait la connaissance de Muddy Waters, qui lui conseille d’entrer en contact avec Leonard Chess, le co-fondateur de la maison de disques Chess Records. Leonard Chess, conscient que le marché du rhythm and blues se réduit, cherche à diversifier ses productions. Ce n’est donc pas le blues de Berry qui l’intéresse, mais une chanson plus inattendue : sa reprise de Ida Red, une chanson country de Bob Wills.

Premier succès avec Maybelline

Le 21 mai 1955, Berry enregistre sa version de Ida Red, rebaptisée Maybellene à propos d’une course de voitures et d’une fille infidèle, avec Johnnie Johnson au piano, Jerome Green (du groupe de Bo Diddley) aux maracas, Jasper Thomas à la batterie et Willie Dixon à la contrebasse. Le single se vend à plus d’un million d’exemplaires et atteint la première place du classement rhythm and blues du magazine Billboard. Pour l’anecdote, le titre est affublé de deux crédits d’écriture supplémentaires. L’un était le disc jockey Alan Freed, en guise de pots-de-vin, et l’autre Russ Fratto, le propriétaire de Chess !

À la fin du mois de juin 1956, Roll Over Beethoven se classe no 29 du hit-parade, et Chuck Berry participe à la tournée « Top Acts of ’56 », durant laquelle il se lie d’amitié avec Carl Perkins. Fin 1957, il participe à une autre tournée, « Biggest Show of Stars for 1957 », organisée par Alan Freed, aux côtés des Everly Brothers et de Buddy Holly, entre autres.

Entre 1957 et 1959, Chuck Berry produit une douzaine de singles à succès, dont quatre qui se classent dans le top 10 des ventes : School Days (mars 1957), Rock and Roll Music (septembre 1957), Sweet Little Sixteen (janvier 1958) et Johnny B. Goode (mars 1958). Il apparaît dans les films Rock Rock Rock (1956) et Go, Johnny, Go! (1959), avec un petit rôle dans le second. À la fin de la décennie, il est devenu une véritable vedette. Il ouvre une boîte de nuit à Saint-Louis, le Berry’s Club Bandstand, et investit dans l’immobilier.

Retour à la case Prison

En décembre 1959, Berry est arrêté pour violation du Mann Act  : il aurait eu des rapports sexuels avec une jeune Apache de 14 ans après lui avoir fait franchir une frontière d’État pour la faire travailler dans sa boîte de nuit. Au terme d’un procès de deux semaines, il est reconnu coupable en mars 1960 et condamné à trois ans de prison.  C’est alors que sa popularité commence à décliner tout comme ses  ventes de disques.

À sa sortie de prison, Chuck Berry bénéficie d’un regain de popularité grâce notamment  aux Beatles qui enregistrent Roll Over Beethoven sur leur deuxième album, tandis que Come On est la face A du premier single des Rolling Stones. D’autres groupes s’en sont fortement inspirés, comme les Beach Boys, dont le tube Surfin’ U.S.A. (1963) reprend la mélodie de Sweet Little Sixteen. Chuck Berry change de maison de disques en 1966 et quitte Chess pour Mercury Records.

Sa tournée au Royaume-Uni en janvier 1965 est ainsi marquée par des performances limites. Sa méthode de travail, qui consiste à faire appel à des groupes locaux sans répéter avec eux avant les concerts, nuit à sa réputation dans le métier. Sur le sol américain, il se produit lors de grands festivals, comme le Schaefer Music Festival, à Central Park, en juillet 1969, ou le Toronto Rock and Roll Revival Festival, au mois d’octobre.

Chuck Berry retourne chez Chess Records en 1970. Il décroche son unique no 1 aux États-Unis en 1972 avec My Ding-a-Ling, une chanson amusante et…  pornographique. Le contrat de Berry avec Chess prend fin en 1975 avec un album simplement intitulé Chuck Berry. Quatre ans plus tard, Atco Records publie Rock It, le dernier album studio de Chuck Berry avant 2017.

Tout au long des années 1970, Berry tourne seul, sans manager ni musicien, dans sa Cadillac, avec sa seule guitare Gibson. Comme à son habitude il demande à des groupes locaux connaissant sa musique de l’accompagner ce qui se révèle pas toujours judicieux. Son concert le plus notable de la décennie est celui qu’il donne le 1er juin 1979 à la Maison-Blanche, à la demande du président Jimmy Carter.

A la fin de années 1970,  aucun concert ne débute avant que le paiement ne soit complètement effectué et en cash.  Il est condamné pour évasion fiscale à quatre mois de prison et 1 000 heures de travaux d’intérêt général, qui se traduisent par des concerts de bienfaisance.
En 1986, il fait partie des premiers musiciens intronisés au Rock and Roll Hall of Fame. Il est également classé 7e sur la liste des 10 plus grands joueurs de guitare électrique de tous les temps par le magazine Time en 2009.

Chuck Berry fut probablement le seul compositeur qui, de son vivant, pouvait se produire en concert dans n’importe quel endroit de la planète en recrutant sur place à la dernière minute généralement dans le bistrot d’en face la salle de concert ! Un artiste atypique, qui a appris à articuler en écoutant Nat King Cole et qui préfère prendre lui-même le volant pendant les tournées, sans limousine ni chauffeur.  Il aura réussi à fusionner le blues et la country pour en faire du Rock n’ roll.

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