• Douglas DC3 : l’avion couteau suisse


    Une fois n’est pas coutume, La gazette d’Hector s’attaque cette fois-ci à une carlingue. Un avion mythique qui a révolutionné l’aviation mondiale. Un avion aux 5 vies. Le Douglas DC3.

    Tout commence en 1936 à l’usine de Santa Monica en Californie. Sous l’impulsion de la compagnie American airlines, la compagnie américaine Douglas Aircraft met au point un avion bi-moteur de 21 à 32 places.  Sa vitesse (370 km/h) et son rayon d’action (3 420 km) vont révolutionner le transport aérien. L’idée est de proposer un avion avec des couchettes. L’aéronef sera le plus construit au monde : 16 000 exemplaires en 10 ans. Il met définitivement le chemin de fer hors course.

    New York-Los Angeles en 15h

    Le JU 52 allemand

    Son concurrent est allemand : le JU 52 en tôle ondulée mais ne peut transporter que 15 passagers. Il ne fait pas le poids. American airlines, à l’initiative de ce projet, baptise chaque avion du nom d’une ville ou d’un Etat américain et propose des vols New York-Los Angeles en 15h. L’atterrissage se fait près de Beverly Hills. Hollywood est sous le charme, la Jet set adopte cet appareil qui la met à portée des grandes villes d’Amérique. La traversée coûte 2 mois de salaire moyen.

    C’est aussi l’arrivée des hôtesses de l’air qui font le charme des compagnies de l’époque. Swiss air est la première compagnie aérienne européenne à passer commande pour ses vols vers Londres, Paris et Berlin.

    Un des héros du débarquement en Normandie

    Mais la seconde guerre mondiale vient bouleverser le destin de cet avion. De civil il devient militaire. En mars 1944, la 101è division aéroportée s’entraîne en Angleterre pour le largage de milliers de parachutistes. Les fameux Band of brothers.

    Il devient  l’un des héros du débarquement su 6 juin 1944 en Normandie. Le DC3 est rebaptisé dans sa version militaire : C47. Il avait également pour mission de tirer des planeurs chargés de matériel qui devaient atterrir derrière les lignes ennemis.

    La star de Berlin ouest

    Marilyn Monroe vante les avions Douglas en 1946

    Après la guerre, en 1946, une certaine Norma Jean Baker, alias Marilyn Monroe pose pour vanter les mérites l’excellence de la maison Douglas.

    Mais la politique reprend ses droits. Les désaccords commencent entre les Russes et les alliés américains, anglais et français qui bloquent le ravitaillement de Berlin Ouest.

    Les DC3 lors du pont aérien de Berlin

    Ces derniers mettent en place un pont aérien… à l’aide de DC3/C47. Des vivres et du charbon  sont déchargés en 30 mn chrono. Surnommé Rosinen Bomber (Bombardier de raisins) par la population, ils font la joie des enfants qui viennent chercher des bonbons.

    Le vietnam en guise d’au revoir

    Bien vite l’avion à réaction supplante le DC3 à hélices. Les Boeing 707 (long-courrier), 727 (moyen-courrier) et 737 (vols intérieurs) révolutionnent à leur tour l’aviation. Mais le phénix renaît de ses cendres. La guerre du Vietnam le rappelle en 1964. Avion de combat avec mitrailleuse embarquée, il est affublé d’un triste surnom : le canonnier volant (voir BD Angel Wings).

    Au service de la planète

    On le croyant fini mais voilà que l’état de la planète le rappelle aux ordres. Dans les années 90, on lui greffe un moteur moderne et on modernise sa cabine de pilotage pour l’envoyer au Pôle Nord et au Pôle sud pour mesurer l’épaisseur de la glace. Le DC3 peut voler lentement (100 km/h) et à basse altitude, ses capacités, sa robustesse et sa fiabilité font merveille. Il peut également atterrir sur la glace, la neige et le gravier. Un couteau suisse on vous dit !

     

     

  • Constantin Joffé : la pellicule en Vogue


    Constantin Joffé est né en Russie en 1922. En mai 1937, il décide de s’envoler pour les Etats-Unis à bord du tragique Hindenburg, dirigeable à coque rigide, fierté de l’Allemagne Nazie, qui s’enflammera à son arrivée sur l’aéroport de Lakehurst, près de New-York. Fort heureusement, Constantin Joffé… retenu aux toilettes rate le vol. Un vol aller-retour équivalent à 10 000€ actuels.

    Ainsi après une traversée paisible et confortable de l’Atlantique en 59h, au départ de Francfort, la coque du LZ 129 Hindenburg, construit par la firme allemande Zeppelin, prend feu en touchant le mât d’amarrage, peut-être sous l’effet d’orages électriques. L’incendie se propage en 34 secondes aidé par les 200 000 m3 d’hydrogène. Du fait d’un embargo des États-Unis frappant l’Allemagne Nazie, l’exploitant du dirigeable avait dû utiliser l’hydrogène à la place de l’hélium, un gaz inerte et non inflammable.

    Sur les 97 personnes à bord, dont 61 membres d’équipage et 36 passagers, 35 périssent en direct devant les caméras. L’arrivée, puis l’accident sont commentés par Herbert Morrison, un journaliste radio présent sur place. Diffusé quelques heures plus tard par la station de radio de Chicago WLS, et le lendemain par la station nationale NBC, ce reportage est entrecoupé par les sanglots du journaliste. Pour la première fois, un accident majeur est en temps réel par un média audiovisuel.

    Dix mois plus tôt, il avait survolé fièrement le Stade olympique de Berlin le jour de l’ouverture des JO, le 1er août 1936.

    Mannequin au Mariage License Bureau de New York, vêtue d’une robe Jeanne Barrie, gants Dawnell, sac Ronay. Costantin Joffé, 1940

    Model crossing street wearing back-buttoned ermine cape on a side-buttoned suit of black Forstmann wool — Image by © Condé Nast Archive/CORBIS, 1946

     

    Constantin Joffé déménage alors en France et rejoint la Légion étrangère française. Il combat pendant la Seconde Guerre mondiale. Il est capturé et passe quelques mois dans un camp de concentration.

    Constantin Joffé parle cinq langues, il rejoint finalement les États-Unis au début des années 40 et devient photographe professionnel. Il travaille pour Condé Nast, groupe américain d’édition de presse magazine détenant les titres The New Yorker, Vogue et Vanity Fair. Il travaille notamment pour Vogue et Glamour magazine à la grande époque des années 50 et 60.

    On lui doit auusi une photographie de Marlboro Man, les films publicitaires de voitures Hertz et la réalisation du premier spot de lave vaisselle Joy. Dans ses dernières années il déménage en Floride et décède en 1992 d’un cancer.

    L’élégance de la mode l’époque des 30 glorieuses caractérise son œuvre.

    VOGUE, 1947

    1946

    VOGUE, août 1945

    1945

    New York, 1944

    New York, 1944

  • Apollo Theater : panthéon de la musique noire


    Quel est le point commun entre Ella Fitzgerald, Billie Holliday, James Brown, Ray Charles ? Ils ont tous chanté au Théâtre Apollo, cette salle légendaire située en plein Harlem, à New York. Avec le Madison Square Garden, c’est l’autre salle mythique de New York. De prime abord ce petit établissement ne paie pas de mine. Une devanture un peu délabrée et  1500 fauteuils seulement à l’intérieur.

    Entre fin 1865 et début 1866, c’est une salle de bal, appelée Apollo Hall, ouverte par un ancien général de la Guerre de Sécession, Edward Ferrero. Une fois son bail achevé, en 1872, le bâtiment est converti en théâtre, qui ferme ses portes  au début du nouveau siècle.

    Le lieu est repris à partir de 1932 par Sidney Cohen puis par Brecher and Schiffman en 1935. Il est renommé Apollo Theater. Dès lors, la musique noire américaine est accueillie avec succès et l’Apollo theatre devient un haut lieu new yorkais du jazz classique où se succèdent les big bands de Count Basie et Duke Ellington. L’Apollo compte environ 1 750 places. Il est réservé à un public blanc. Peu à peu, la fin de la prohibition et l’effervescence du quartier à cette époque  favorisent le développement et l’évolution des clubs de jazz qui vont s’ouvrir à un plus large public et aux gens de couleur.

    Ella Fitzgerald découverte au cours de l’Amateur Night @ The Apollo Theatre

    En 1934, le théâtre ouvre ses portes aux amateurs avec l’ Amateur Night show : Ella Fitzgerald, Billie Holiday, Diana Ross & The Supremes, Gladys Knight & the Pips, Patti LaBelle, Marvin Gaye, Stevie Wonder, Aretha Franklin, Ben E. King, The Jackson Five sans oublier James Brown se succèdent. Ce dernier reviendra sur la scène de l’Apollo en 1962 enregistrer à ses frais son disque Live at the Apollo devant 1 500 personnes déchaînées. Tous ont fait leurs premiers pas sur scène grâce à ce concours organisé tous les mercredis soir à l’Apollo Theater.

    Un candidat pendant l’Amateur Night de l’Apollo

    De cette histoire des lieux est née une expression emblématique, utilisée comme slogan publicitaire et qui fera rêver beaucoup de noirs américains en quête d’ascension sociale : « Apollo Theater : where stars are born and legends are made » (« Le Théâtre Apollo, où naissent des étoiles et se créent les légendes »).

    James Brown à l’Apollo Theater en 1962

    Comme souvent le choc musical des années 70 vient perturber ce lieux mythique transformé en cinéma en 1975 avant sa fermeture en 1976.  Après son rachat en 1985, l’Apollo Theater retrouve, son aura perdue et remet au gout du jour l’événement qui avait fait sa gloire :  « La Nuit des amateurs ». Il est classée sur la liste nationale des sites historiques. Il reçoit la visite de 1,3 million de personnes chaque année. Barack Obama y est passé pour y prononcer un discours quelques mois avant son élection à la Maison Blanche. Tout un symbole.

    Barak Obama à l’Apollo Theater

  • Slim Aarons :   carte postale de la Jet set


    Slim Aarons et ses Leica

    Slim Aarons, George Allen de son vrai prénom, né en 1916 à Manhattan est un photographe américain réputé pour ses photographies de la jet set et de la haute société dans les années 1950, 1960 et 1970.

    Pourtant, la vie d’Aarons commence sous les affres de la guerre. A l’âge de 18 ans, il s’enrôle dans l’armée américaine et travaille comme photographe à l’académie militaire de West Point. Il devient reporter de guerre lors de la Seconde Guerre mondiale où il est décoré de la Purple Heart.

    Le photographe de la Jet set

    Après 1945, Aarons rejoint le magazine Holiday armé de son Leica où il devient un des photographes officiels.

    Il rejoint ensuite la Californie et commence à photographier des célébrités dans des endroits magnifiques, à la manière de natures mortes. C’est là qu’il prend la photographie la plus admirée, Kings of Hollywood, une photo du nouvel an 1957 représentant Clark Gable, Van Heflin, Gary Cooper et Jimmy Stewart se détendant dans un bar « sapés comme jamais ».

    Marilyn Monroe avec le courrier de ses fans par Slim Aarons, 1952

    Le travail de Slim Aarons apparaît dans Life, Town & Country, Holiday, Travel and Leisure. Une référence. Tout le monde le connait : de John Fitzgerald Kennedy à Marilyn Monroe, dès les années 50, tous le côtoient aux soirées de gala et apprécient son oeuvre. L’ancien président des Etats-Unis, qu’il croise en voiture à Palm Springs un été lui demande : “Est-ce que la fille que tu as shooté au bord du lac de Côme était aussi belle en vrai ? “. Autre anecdote : le film d’Alfred Hitchcock, Fenêtre sur cour (1955), dont le personnage principal est un photographe interprété par James Stewart, se déroule dans un appartement réputé être inspiré de celui d’Aarons.

    Un livre témoin incontournable

    Alvin and Lilly Fuller-dans leur nouvelle maison à Palm Beach en Floride pose devant leur Mercedes 190 SL.

    Les photographies d’Aarons ont la particularité de ne faire appel à aucun artifice de lumière et maquillage. Il utilise uniquement la lumière naturelle. Aarons a bâti sa carrière sur ce qu’il appelle «photographier des gens attirants faisant des choses attirantes dans des endroits attirants». «Je connaissais tout le monde» déclare-t-il au cours d’un entretien avec The Independent, en 2002 (il est décédé en 2006). «Ils m’invitaient à leur fêtes car ils savaient que je ne leur ferais pas de mal. J’étais l’un d’entre eux». Slim Aarons avait une vraie passion pour la Dolce Vita ce qui lui permettait de se fondre dans cet univers.

    Quand Slim Aarons publie A Wonderful Time en 1974, son album photo sur le Jet set de l’époque, le livre tombe à plat. Quatre décennies plus tard, c’est une inspiration essentielle pour les meilleurs designers, directeurs artistiques et décorateurs d’intérieur. Un livre en version original s’arrache aujourd’hui à 2000$ : «Je n’arrive pas à comprendre pourquoi les gens l’aiment tellement aujourd’hui», s’interrogeait-il à l’époque.

    En faisant irruption à Newport, Acapulco, Palm Beach, Capri ou encore Palm Springs, dans le monde des piscines luxueuses de la Jet set , Aarons a su rendre les gens riches sexy et faire de ce livre une œuvre cool et chic.

    L’actrice australienne Mara Lane au Sands de Las Vegas en 1954

  • Raymond Cauchetier : l’ektachrome de la Nouvelle Vague


    Une exposition consacrée à la Nouvelle vague se tient à la galerie Joseph dans le IIIè arrondissement de Paris  jusqu’au 16 septembre 2018. L’occasion de découvrir le travail formidable du photographe Raymond Cauchetier.

    Raymond Cauchetier a 99 ans aujourd’hui. Avec Georges Pierre, décédé en 2003, il a couvert 95% des films de la Nouvelle Vague. : Godard, Truffaut, Chabrol, Resnais… «  On ne savait pas qu’on vivait des moments exceptionnels » avouera-t-il.

    Jean-Paul Belmondo dans ‘A bout de souffle’ de Jean-Luc Godard

    Les portraits notamment sont magnifiques, Jean Seberg est sublime et Belmondo s’installe comme la gueule de cinéma français

    Ses photos ont fait le tour du monde et pourtant il est resté inconnu, car l’auteur n’était jamais crédité, il fallut plus de 50 ans pour qu’il en récupère une partie des droits et fasse connaitre son nom.

    Saigon en 1955 – Photo de Raymond Cauchetier

    Sa vie est un vrai film. Son seul diplôme est celui de l’école primaire. Il fut résistant pendant la guerre, participa à la libération de Paris, fut chef du service de l’information du commandement de l’air en Indochine et publia à 10 000 exemplaires un premier album Ciel de guerre en Indochine. Il constitua également une énorme archive de 3.000 photographies du patrimoine indochinois à la demande du roi du Cambodge, trésor aujourd’hui disparu car détruit par les Khmers rouges lors de la prise du palais royal.

    Retour en images sur les photos marquantes du photographe :

    Jean-Paul Belmondo & Jean Seberg dans A bout de souffle (1959), Jean-Luc Godard © Raymond Cauchetier

    Dans A bout de souffle le baiser hâtif en septembre 1959 entre Seberg et Belmondo marquait le terme d’un long panoramique filmé du dernier étage des Champs-Elysées. «Il était quasi invisible vu des toits, raconte le photographe Raymond Cauchetier. Il m’a semblé que ce bref instant pouvait résumer l’esprit du film et j’ai demandé aux comédiens de rejouer la scène. » Un cliché largement repris pour la promo du film.

    Jean Seberg sur le tournage de A bout de souffle terrorisée par les méthodes de Jean-Luc Godard.

    Toujours dans ce même film lors du premier jour de tournage de Jean Seberg. Dans un café, elle fait face à Godard, qui lui montre un cahier griffonné. « Que dois-je dire, que dois-je faire ? », s’affole la comédienne. « Je vous le dirai pendant le tournage », lui répond le réalisateur. « Elle était paniquée par la façon de travailler de Jean-Luc Godard », détaille Raymond Cauchetier. Quant à Belmondo, présent depuis une semaine, il sait que le tournage se déroule dans l’improvisation la plus totale. « Il était toujours agréable et souriant. C’est l’une des personnes les plus sympathiques que je connaisse, qui n’a jamais pris la grosse tête. »

    Dans Adieu Philippine film de 1960, Jacques Rozier dirige un travelling sur le toit d’une 2 CV, à Calvi, en Corse. «Le chef opérateur Roger Mathelin découvre que la suspension est idéale pour remplacer les chariots de travelling, à condition de la lester lourdement, raconte Raymond Cauchetier. Toute l’équipe technique est montée pour une prise de vues sur un chemin cahoteux, en dégonflant les pneus de la CV. »

    Un choix de photos difficile à faire tant les clichés noir et blanc sont magnifiques, témoins d’une époque insouciante où le cinéma français marquait son époque.

    Jean-Paul Belmondo… de dos et Jean Seberg sur le tournage d’A bout de souffle.

    Exposition Icônes de la Nouvelle Vague aux années 1970, jusqu’au 16 septembre 2018 à la Galerie Joseph, 16, rue des Minimes (IIIe). Ouvert tous les jours de 10 heures à 20 heures. Entrée libre.

  • Oscar Mayer : Hot Rod en cuisine


    Quand on parle de réussites industrielles  aux Etats-Unis, spontanément les images de Coca Cola, Ford, Texaco ou bien encore Boeing viennent à l’esprit. Pourtant,  un immigré, d’origine allemande, a su mettre l’Amérique à ses pieds avec une idée simple : le Hot Dog Oscar Mayer. Une référence aujourd’hui.

    Michigan. 1836. Les caravanes de migrants allemands inondent les routes en direction de Saint Louis, Chicago et La Nouvelle Orléans. Poussée par les Prussiens, l’antisémitisme fait rage en Allemagne, les juifs sont privés d’emplois publics et de mariage, la Bavière, en particulier, est désertée. Bref, le désarroi pousse la communauté juive allemande à prendre la poudre d’escampette vers un eldorado tout nouveau : l’Amérique. Le Pays du Far West est en pleine mutation, se modernise, paddle boat, routes et bientôt  chemins de fer arrivent à coup de charbon.

    Immigrés juifs allemands aux Etats-Unis

    Les allemands arrivent avec leur savoir-faire.  Colporteurs, quincailliers, artisans dans la confection viennent proposer leurs services.  La proportion d’immigrés européens passe de 1,4 % en 1815 à 9,7 % en 1850. Les allemands se concentrent tout d’abord dans trois États : Ohio, Indiana et Illinois. En 1830 cette immigration s’accélère. Les Allemands sont 152 000 à entrer aux États-Unis, contre 46 000 pour les Français, puis 435 000 en 1840 et 5 millions en 1960. Mais ce n’est pas la communauté la plus importante. Les Irlandais sont 781 000, tous ont fui la grande famine de 1845 causée par le mildiou et qui a anéanti les réserves de pommes de terre.

    Face à cette folie migratoire et les Etats redoublent de bienveillance et draguent ces européens robustes caractérisés par un coup de fourchette qui ne fait pas mentir la légende. Les Allemands avancent alors un peu plus dans le Midwest. Beaucoup contribuent au développement industriel de la région des Grands Lacs ou deviennent fermiers dans le nord des grandes plaines, où ils cultivent le blé et le maïs non loin de la frontière canadienne. Peu à peu, les paysans et les artisans sont rejoints par des médecins, juristes, pasteurs, professeurs.

    Parmi ce flot migratoire, la famille Mayer arrive sur le sol américain en 1873 et prend la direction de Detroit où une grande communauté allemande s’est installée. Le jeune Oscar, accompagné de son frère Gottfried, a alors 14 ans. Il devient garçon boucher sur les marchés.

    Oscar le roi du cochon 

    Oscar Mayer store

    En 1876, Oscar rejoint son frère établi comme fabricant de saucisses et de jambons à Chicago. Il a alors 17 ans et trouve rapidement du travail au Kohlhammer’s Market, puis chez Philip Armour & Company, entreprise agro-alimentaire réputée. En 1883, Oscar, le petit malin, a suffisamment économisé pour louer une entreprise en faillite, le Kolling Meat Market, dans un des quartiers allemands. Les ventes du premier jour totalisent 59 $. Les coupes de porc coûtent à l’époque entre 8 à 12 cents la livre. Les spécialités culinaires des frères Mayer sont réputées pour tenir au corps ! L’adresse est courue. Jambons de Westphalie, brockwurst, saucisses de foie, bacon et saucisses font des merveilles auprès des 470 000 allemands de Chicago, soit un habitant sur quatre. La société Oscar Mayer & Brother est vite rebaptisée Oscar Mayer & Company. En 1893 la « fine » équipe sponsorise l’exposition universelle de Chicago. Une réussite exemplaire 20 ans après leur arrivée sur les terres de l’Oncle Sam. En 1900, la TPE devenue PME compte 43 salariés et en 1904, Oscar Mayer appose sa marque sur ses produits et six ans plus tard ils adhèrent  au  programme fédéral d’inspection des viandes, réservé pourtant aux industries agro-alimentaire. En 1929, ils créent la bande jaune en tant qu’indicateur de viande de haute qualité. Le Deutsch kalitât avant l’heure en quelque sorte !

    Wienermobile : le food truck vintage 

    International D-300 Wienermobile

    Mais le coup de génie  vient en 1936. Dans une Amérique emportée par un secteur automobile dynamique, Oscar ou plus exactement son neveu a une idée de génie. En 1936, l’homme « sandwich » crée une voiture sandwich : la Wienermobile. Un food truck vintage en forme de hot dog faisant la promotion des produits de la gamme à travers tout le pays. En allemand, « Wiener » est une saucisse de Vienne. Le terme est largement utilisé aux États-Unis pour nommer la saucisse des hot dogs. Si un parallèle devait être fait avec notre bon goût culinaire, à la douceur de vivre hexagonale et par la même occasion au charme automobile à la française nous dirions que la 2 cv Justin Bridou de notre tour de France cycliste est la cousine de la Wienermobile. Mais revenons à notre saucisse. Au total huit modèles différents se succèdent. La partie basse du véhicule, beige sur les plus anciens modèles et jaune sur les plus récents, représente le pain, tandis que la partie supérieure orange, contenant l’habitacle prend la forme d’une saucisse. La première Wienermobile conduite successivement par huit « pilotes » nourrit sa légende grâce à Meinhardt Raabe. Acteur de (très) petite taille, il connait son heure de gloire dans le rôle du coroner Munchkin dans le film ” Le Magicien d’Oz ” en 1939. Pilote « ambassadeur » pour Oscar Mayer jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, son surnom « Little Oscar le plus petit chef du monde » n’a rien d’un hasard. Le véhicule a peu d’espace pour les passagers, Mayer réalise que le porte-parole doit être petit et choisit Meinhardt dont la taille ne dépasse pas 1m40.

    Meinhardt Raabe en Little Oscar avec la Wienermobile

    Après la seconde guerre mondiale, en 1952, la Wienermobile est relancée avec une flotte de cinq véhicules sur un chassis Dodge. Cette version est exposée au Musée Henry Ford à Detroit. Oscar Mayer décède en 1955 laissant derrière lui une réputation flatteuse du Roi du Hot Dog. La famille prend la relève et perpétue la tradition entre qualité, traçabilité et… Wienermobile.

    En 1958, le nouveau modèle proposé par Brooks Stephens, un designer industriel, est  plus « gras » que le modèle original de 1936. Plus long, il met au défit les rois du créneau version tête à queue. Dans la foulée, Oscar Mayer teste d’autres supports de communication avec  en 1963 ses premier spots radio et deux ans plus tard un  spot télé.   La Wienermobile de 1969, quant à elle, prend le meilleur et propose des feux arrière de Ford Thunderbird et un cadre de camping-car Chevrolet. En 1981, Oscar Mayer est vendue à General Foods puis à Kraft General Foods, nom de la division alimentaire de Philip Morris issue premier groupe agroalimentaire d’Amérique du Nord. La Wienermobile ne disparaît pas pour autant et est bien présente pour célébrer le 50e anniversaire de la marque en 1986. Deux ans plus tard, les marques de jouets Hot Wheels et Matchbox y vont de leurs répliques miniatures à l’échelle 1:64e.

    Les hotdoggers aux commandes

    Accident en 2009 à Mount Pleasant dans le Wisconsin d’une Wienermobile

    L’année 1988 est un tournant pour la compagnie Oscar Mayer avec l’arrivée du programme Hotdogger. Chacune des six Wienermobiles en fibre de verre est dirigée par une équipe de Hotdoggers. Les Hotdoggers sont diplômés, ont les dents blanches, sont bien bâtis et connaissent tout du Hot dog. Ils font partie de la « crème » des campus universitaires américains. Seulement 12 sont sélectionnés sur plus de 1000 candidats. Un camp de formation de deux semaines leur est proposé pour apprendre à conduire  la Wienermobile et tout connaître de l’histoire de la société Oscar Mayer. Tels les Apollons d’ Abercrombie & Fitch , les Hotdoggers sont les « gentils animateurs » d’Oscar Mayer. Supermarchés, foires agricoles, événements sportifs, tout y passe.  A bord de leur bus à saucisses  équipé de  sièges baquets, micro-ondes et téléviseurs,  ils sillonnent tout le pays.  Le modèle  de 2004, long de 8,23 mètres est équipé d’une sonorisation capable de jouer le jingle publicitaire de la marque en vingt-et-un styles musicaux différents. Construit à Santa Barbara en Californie, il est basé sur un châssis Chevrolet et du moteur GM Vortec  5700. Mais la saucisse est parfois difficile à manœuvrer en témoigne l’accident spectaculaire de 2009 à Mount Pleasant  dans le Wisconsin. Certains auraient-ils voulu enlever la peau du saucisson ?

    ADN de la marque, les Wienermobiles continuent leur expansion avec la Wienermini cooper sur une base de Mini, le scooter Winercycle en version side, mais également le  Wiener Rover  télécommandé et enfin le petit dernier le Wienerdrone qui comme son nom l’indique prend les airs jusqu’à 1200 pieds et se prend pour le Roi de la livraison à l’instar du drône Amazon.

    Ce n’est plus une écurie mais une vraie flotte que vous pouvez louer via twitter depuis 2014. Le plus impressionnant d’entre eux reste l’indéboulonnable  Wienermobile classique pouvant contenir jusqu’à 27 000 hot dogs. Mais une question demeure depuis l’origine  : Ketchup ou mayo ?

    Wienermobile de 1952

    En hommage à Jean-Paul Milhé de la revue Carlingue pour lequel cet article était prévu.

  • Martin Luther King : 4 avril 1968 requiem pour les droits


    Le 4 avril 1968 à 18h01, Martin Luther King est assassiné sur le balcon du Lorraine Motel qui devient à partir de ce jour un hôtel mythique dans l’histoire des Etats-Unis. Le pasteur baptiste afro-américain, militant non violent pour les droits civiques des noirs, pour la paix et contre la pauvreté, s’écroule à 39 ans abattu d’une balle dans la gorge par un certain James Earl Ray, ségrégationniste blanc.

    Martin Luther King nait le 15 janvier 1929 au 501 Auburn avenue à Atlanta, transformé aujourd’hui en Musée. Fils d’un pasteur et d’une organiste d’église, il a une soeur aînée Christine et aura un plus jeune frère Albert. Il grandit dans une Amérique ségrégationiste mais dans un milieu privilégié. Ses copains blancs ne sont bientôt plus autorisés à jouer avec lui. La ségrégation raciale fait son oeuvre. A 15 ans il entre à Morehouse collège, une université réservée aux garçons noirs. Il en sort diplômé en Sociologie en 1948 puis enchaîne avec une licence en théologie et enfin obtient son doctorat en théologie l’Université de Boston en juin 1955. En 1953, il épouse Coretta Scott qui lui donnera quatre enfants : Yolanda, Martin Luther King, Dexter Scott et Berenice. Cette même année il devient le pasteur de l’église baptiste à Montgomery en Alabama. On est alors à l’apogée des violences faîtes aux noirs par les ségrégationistes comme l’a vécu un certain Nat King Cole, originaire de Montgomery.

    Rosa Parks, le point de départ

    Le 1er décembre 1955, une jeune femme noire fait trembler à elle seule les certitudes de la blanche amérique : Rosa Parks. Refusant de céder sa place à un blanc dans un autobus, elle est arrêtée et doit payer une amende de 10$. Martin Luther King appelle alors au boycott des bus de Montgomery. Son premier combat.  Les afro-américains organise alors un système de covoiturage pendant 382 jours. Martin Luther king est arrêté, sa maison est attaquée à la bombe incendiaire, des églises sont brulées mais en dépit des violences physiques les 40 000 noirs de la ville continuent à marcher quitte à faire jusqu’à 30 km pour aller travailler. Le boycott s’achève par la décision de la Cour suprême des Etats-Unis le 21 décembre 1956 déclarant illégale la ségrégation des les autobus, restaurants, écoles et autres lieux publics. Une première victoire.

    A partir de ce moment, il reprend à son compte une philosophie chère à Gandhi : la désobéissance civile non violente. Il devient Président de la Southern Christian Leadership Conférence (SCLC). En 1958, il expose son point de vue dans son livre “Stride toward freedom; the Montgomery story”. Le 20 septembre, il est victime de son premier attentat, une femme déséquilibrée (noire) le poignarde dans un magasine Harlem lors d’une séance de dédicace. En 1959, il poursuit son oeuvre épistolaire et publie “The Measure of A Man”. Martin Luther King organise des marches non violentes contre le système de ségrégation du sud et les lois Jim Crow. Les médias commencent à s’intéresser à ce pasteur et une vague de sympathie s’empare de l’opinion publique du Nord. Le mouvement des droits civiques devient le sujet politique le plus important des Etats-Unis en 1960. Cette même année Ruby Bridges est la première enfant noire à intégrer une école de blancs… non sans conséquence pour elle et sa famille. Le FBI met Martin Luther King sur écoute en 1961.

    En 1961, il rejoint les militants du Student NonViolet Coordinating Committee et du National Association for the Advancement of Colored et participe à des actions d’occupation de bibliothèques, stations de bus, restaurants réservés aux blancs à Albany en Georgie. Mais rien n’y fait, le mouvement commence à faiblir en dépit des quelques séjours en prison qu’il effectue.

    Campagne de Birmingham

    Birmingham, ville de 350 000 habitants est peuplée à 65% de personnes blanches et de 35% de personnes noires. Elle est caractérisée par une loi locale la plus dure des Etats-Unis en terme de ségrégation raciale. 10% de la population noire est inscrite sur lesdites électorales. Seuls les emplois manuels aux aciéries sont réservés aux noirs, les salaires des noirs sont inférieurs à ceux des blancs. Plus de 50 attentats racistes non élucidés entre 1945 et 1962 ont donné à la ville le surnom de “Bombingham”.

    Un jeune homme de 17 ans attaqué par un chien policier à Birmingham, Alabama, le 3 mai 1963. Une photo qui fera la couverture du New York Times.

    Le Pasteur Shuttlesworth demande de l’aide à Martin Luther King. Les actions commencent par un Boycott des magasins pour forcer les chefs d’entreprise à ouvrir les emplois de vendeurs aux personnes de couleur et fermer les caisses réservées aux blancs. La lutte se poursuit par des sit-in dans les restaurants et bibliothèques, agenouillement de personnes noires dans les églises réservées aux blancs. Un seul but provoquer des arrestations en nombre et ouvrir ainsi des négociations.

    Martin Luther King est arrêté le 13 avril. Il écrit la célèbre Lettre de la Prison de Birmingham, traité définissant sa lutte contre la ségrégation. C’est alors que John Fitzgerald Kennedy, le jeune Président,  prend la main et fait libérer King. Les scènes de violences policières se multiplient. Relayées par les médias, elles font perdre pied peu à peu à la ville qui ne s’en sort plus économiquement. Plus aucun commerce de la ville ne fonctionne.

    Robert Kennedy alors Ministre de la Justice envoie la Garde républicaine à la suite de deux attentats à la bombe contre un hôtel où résidait Martin Luther King et contre la maison de son frère. Le mouvement de King s’affirme. Le Président Kennedy s’adresse à la nation le 11 juin 1963. Il annonce un projet de loi mettant fin à la ségrégation raciale aux Etats-Unis.

    I have a dream

    President Lyndon B. Johnson rencontre Martin Luther King Jr. le 3 décembre 1963 dans le cas de la promulgation de la Loi sur les droits civiques.

    Le Président Kennedy s’adresse à la nation le 11 juin 1963. Il annonce un projet de loi mettant fin à la ségrégation raciale aux Etats-Unis. Il sera voté le 2 juillet 1964 sous le Président Johnson. Les six grandes organisations pour les dits civiques décident alors l’organisation d’une grande marche sur Washington le 28 août 1963. Cette démarche est un manifeste pour la fin de la ségrégation raciale dans les écoles publiques, l’interdiction de discriminer dans le monde du travail, la protection des militants des droits civiques contre la violence policière, un salaire minimum de 2$ de l’heure. La marche connaît un succès phénoménal avec plus 250 000 personnes. Face au Lincoln Mémorial, Martin Luther King prononce alors son fameux discours “I have a dream” pour la fraternité qui fera date.

    Le terrible attentat du 15 septembre vient parachever de manière tragique cette lame de fond. Le Ku Klux Klan fait exploser une bombe contre l’église baptiste de Birmingham pendant la prière provoquant la mort de quatre jeunes filles noires et blessant 22 enfants, provoquant l’indignation nationale.

    Le 14 octobre 1964, Martin Luther King devient le plus jeune lauréat du Prix Nobel de la Paix pour avoir mené une résistance non-violente afin d’éliminer les préjudices raciaux aux États-Unis.

    Selma l’insoumise

    Décembre 1964, Martin Luther King et le SCLC se joignent au comité étudiant non violent à Selma toujours en Alabama. La moitié des habitants de la ville est noire mais seulement 1% est inscrit sur ls listes électorales. Le 7 mars une marche vers la capitale de l’Etat Montgomery distante de 80 km est organisée mais les manifestants pacifistes sont arrêtés sur le Pont Edmund Pettus par la police et une foule de belligérants à coups de gaz lacrymogènes. Ce jour est connu sous le nom de Bloody sunday. Les reportages montrant des manifestants pacifistes se faisant lyncher font le travail de l’opinion.

    La journée du 21 mars est la bonne. Après 20km par jour, plus de 25 000 marcheurs atteignent Montgomery le 25 mars . Martin Luther King prononce son discours “How Long, Not Long”.

    Après ce “fait d’arme”, Martin Luther King s’installe en 1966 à Chicago près des bidonvilles pour continuer la lutte. Ses nouveaux combats sont la lutte contre la pauvreté et la Guerre du Vietnam. Un combat incompris par la majorité des américains au début du conflit (ce qui ne sera plus le cas au début des années 70). King commence à se mettre les médias à dos. On ne touche pas au patriotisme américain. Martin Luther King traverse pays de long en large pour rassembler une armée multiraciale des pauvres afin de faire signer une déclaration des droits de l’homme des pauvres. Il dénonce le militarisme ambiant en opposition aux besoins des pauvres du pays.

    Lorraine Motel, fin du voyage


    Fin mars 1968, Martin Luther King se déplace à Memphis pour soutenir les éboueurs en grève. A 18h00, le 4 avril, alors qu’il sort sur le balcon du Lorraine Motel, sa garde rapprochée entendent des coups de feu et courent à l’extérieur. Martin Luther King gît par terre une balle dans la gorge. Il a 39 ans.

    Assassinat de Martin Luther King

    Son autopsie révèle un corps extrêmement fatigué, rongé par le stress. Son coeur paraissait celui d’un homme de 60 ans après avoir parcouru plus de 9 millions de kilomètres.

    Jackie Kennedy et Coretta Scott King à l’enterrement de Martin Luther King Jr

    L’assassin est un certain James Earl Ray, ségrégationniste blanc arrêté avec un faux passeport à l’aéroport Heathrow de Londres. Il est extradé et est condamné à 99 ans de prison. Sa culpabilité ne fait pas encore aujourd’hui l’unanimité. A qui profitait crime ?

    Martin LutherKing est enterré au Martin Luther King Jr National Historic site à Atlanta. avec l’inscription “Enfin libre”. Le Lorraine Motel est aujourd’hui le National Civil Rights Muséum. Le 4 avril 1968 est un jour férié aux Etats-Unis. Le combat continue.

     

    Le bus de Rosa Parks est maintenant exposé au musée Henry Ford (Dearborn, Michigan).

    Le Lorraine Motel est aujourd’hui le National Civil Rights Muséum.

  • L’Héroïne de “We can do it ! ” est décédée


    Naomi Parker Fraley héroïne de l’icônique affiche “We can do it” est décédée à l’âge de 96 ans.  Elle aura ignoré presque jusqu’à sa mort qu’elle était l’inspiration du créateur de l’affiche.

    Le poster emblématique des luttes féministes

    Publicité US pour inciter les femmes à travailler et participer ainsi à l’effort de guerre.

    Cette ouvrière d’une usine d’équipement militaire d’Almeda, en Californie, avait inspiré cette affiche à l’artiste J. Howard Miller. Son bandana rouge à pois blancs, son bleu de travail et son biceps brandi ont fait le tour du monde. À la fin de l’année 1941, les États-Unis sont frappés par l’attaque de Pearl Harbor et entrent dans la Seconde Guerre mondiale. Les femmes remplacent en nombre les hommes dans les usines.

    L’objectif de Roosevelt était de permettre aux États-Unis de remporter la guerre avant tout, de par leur puissance économique. Et les femmes, du coup, se sont vues ouvrir des emplois. Elles sont 12% dans les chantiers navals et 40% dans les usines. Placardée dans les usines américaines en 1943 pour célébrer le travail des femmes, cette campagne avait été initiée pour décourager l’absentéisme et les grèves à répétition. Les militants féministes ont par la suite repris ce slogan à leur compte.

    Naomi Parker Fraley alias Rosie the riveter

    Aux Etats-Unis, les millions de femmes qui ont travaillé durant la guerre sont connues sous le nom de « Rosie the Riveter » (Rosie la riveteuse), dont le poster est l’une des incarnations. Naomi Parker Fraley a ignoré presque jusqu’à sa mort à Longview, dans l’Etat de Washington, qu’elle était l’inspiration probable du créateur de l’affiche J. Howard Miller.

    Une longue enquête pour identifier l’héroïne

    26 Mars 1942, Alameda, California, Etats-Unis – Naomi Parker en pleine séance d’usinage

    Longtemps, une autre ouvrière, Geraldine Hoff Doyle, avait été identifiée à tort. Une longue enquête menée à partir de 2010 jusqu’en 2015 par le professeur James J. Kimble de l’université américaine de Seton Hall a conduit à un cliché publié dans la presse en 1942 sur lequel on voit Naomi Parker Fraley. Sur l’image en noir et blanc, la jeune femme âgée d’une vingtaine d’années porte un foulard à pois qui retient ses cheveux alors qu’elle manipule une machine de l’usine d’équipement militaire où elle travaillait.

    « Les femmes de ce pays ont besoin d’icônes de nos jours », avait déclaré Naomi Parker Fraley dans une interview au magazine People en 2016. « Si elles pensent que j’en suis une, cela me rend heureuse ». L’affiche est  exposé au @memorialcaen

    Naomi Parker Fraley et l’affiche qui l’a rendue célèbre sur le tard.

     

  • PLAYBOY : le lapin coquin


    Le 27 septembre 2017 décédait une institution de l’érotismes de 50’s : Hugh Hefner alias « Hef », créateur de l’iconique Playboy.

    Qui l’eut cru ? Le grand manitou de la presse érotique mondiale grandit dans une famille stricte de méthodistes où le sexe est tabou. Vierge jusqu’à 22 ans, marié à 25 ans et voguant de galère en galère au début de sa jeunesse, il crée Playboy en décembre 1953, son exutoire. Il laisse libre court  à sa vision du sexe comme instrument de libération. Il a alors 27 ans.

    Naissance de Play boy en 1953

    Mildred Williams la première femme de Hugh Hefner

    Mais revenons un temps en arrière. À la fin de sa scolarité, Hugh Hefner intègre l’US Army à la fin de la seconde guerre mondiale. Après son service militaire, il  s’inscrit en psychologie à l’université de l’Illinois à Chicago. Le 25 juin 1949, il épouse Mildred Williams avec qui il a deux enfants : Christie et David. Les temps sont durs. En 1953, il décide alors de créer un magazine destiné aux hommes avec quelques photos de Marilyn Monroe nue, achetées 500 dollars. Le magazine se veut  libertin, festif et sensuel mais avec des articles de fond sur la société, le sport ou la politique… et sa playmate du mois. Bettie Page, Jayne Mansfield, Mamie Van Doren,… posent. Un succès.

    Hugh Hefner en plein “travail” avec Cynthia Maddox en 1958

    Au travail, Hugh Hefner, ne quitte pas sa pipe et a des pratiques bien à lui. Il accomplit son travail « par terre dans son bureau et ne s’assoit que très rarement devant sa table de travail». Plus tard, Il encourage ses employés « à donner libre cours à leurs pulsions sexuelles» et leur distribue de la déxédrine dont les propriétés neurostimulantes… ne sont plus à prouver. Le 4 juin 1963, Hugh Hefner est arrêté pour vente de littérature obscène. Ses frasques avec ses légendaires playmates agacent au plus haut point les autorités et les puissants lobbies défendant les valeurs chrétiennes. Pourtant, le patron de Playboy met son magazine, et sa fortune, au service de causes nobles, histoire d’agacer encore un peu plus l’Amérique puritaine.

    Le 20 juin 1961 Hugh Hefner pose avec Bonnie J. Halpin “bunny-girl” du  Playboy nightclub de Chicago

    Dès les années 1960, il prend position en faveur du droit à l’avortement. Dans les boîtes de nuit et les émissions télé Playboy, il invite des artistes noirs et défend leurs droits civiques. Son dernier combat portera sur le mariage homosexuel.  Il se déclare féministe avant l’heure « J’ai été féministe avant même qu’il y ait quelque chose qui s’appelait féminisme », déclarera-t-il plus tard « Les femmes ont été les grands bénéficiaires de la révolution sexuelle. Elles ont pu être des êtres sexuels naturels, comme les hommes. C’est là que le féminisme aurait toujours dû être.». Hefner, qui se vante d’avoir couché avec 1 000 femmes, adore s’entourer de ses « Bunnies » aux maillots serrés et queues de lapin. Il les fait parader à la moindre occasion. Hefner est persuadé que les filles biens aiment aussi le sexe. Idée quelque peu révolutionnaire dans les années 50. Grand psychologue devant l’éternel, Hef’ se justifie ainsi : « Ma vie est un test de Rorschach. Les gens y projettent leurs rêves, leurs fantasmes et leurs préjugés. Donc soit ils sont fans, soit jaloux, soit ils ne sont pas d’accord. »

    Un manoir, un jet

    Hugh Hefner dans son jet Douglas DC-9

    Très vite, l’homme fait fortune. Il se déplace dans les années 70 à bord d’un Douglas DC-9 personnel, peint en noir et spécialement aménagé nommé Big Bunny. Le Big Bunny est aménagé et décoré par les architectes Ron et Suzanne Dirsmith comme un manoir miniature, avec des chaises pivotantes, une douche pour deux personnes, un énorme canapé-bar, une piste de danse et même un lit elliptique avec chaîne stéréo. Un must à l’époque. Le jet lui sert également à faire quelques escapades amoureuses… il faut bien entretenir la légende.

    Joyeuse fête au manoir Playboy Mansion

    L’ascension de Playboy s’accélère avec celle de la libération des mœurs des 60’s. Il achète un manoir, le Playboy Mansion à Chicago, sa ville natale, où il donne des fêtes sans fin dignes de… Berlusconi. Il immigrera ensuite vers Los Angeles. The place to be ! Les  acteurs, musiciens et toute la jet-set se précipitent dans ce haut lieu du  glamour et du vice. Dans les années 70, 7 millions d’exemplaires de Playboy inondent le monde. L’empire commercial est en marche. Films, émissions télévisées, « vêtements » succins, bijoux, accessoires se parent du plus célèbre lapin du monde. Les boîtes de nuit, casinos et hôtels n’y échappent pas non plus.

    Hugh Hefner “travailleur” insatiable

    Rédacteur en chef rigoureux, il n’hésite  pas à payer cher les plumes qu’il voulait avoir dans son magazine. Coquin oui mais intello aussi. Ainsi Malcom X, Mohamed Ali, Fidel Castro ou Steve Jobs seront interviewés par Playboy.

     

     

     

    Des bunnies et des mariages

     

    Hugh Hefner avec Sylvia Sydney, Joan Bradshaw and Caroline Mitchell en 1957

    Côté cœur les mariages d’Hugh Hefner sont  plutôt couleur « blonde platine ». Il se marie, en 1989, avec Kimberley Conrad, « Playmate de l’année , il a 63 ans, elle en a 26. Ils ont  deux enfants. En 2010, il se fiance avec la playmate Crystal Harris qui  le quitte quelques jours avant la cérémonie. Deux ans plus tard, il épouse un autre petit lapin, Crystal Harris, 26 ans. Hugh Hefner  casse sa pipe neuf mois plus tard à l’âge de 91 ans.

    Hefner avait acheté en 2009, sa tombe située à côté de celle de Marilyn Monroe au cimetière Westwood Memorial Park de Los Angeles. Il savait que  les mythes sexuels se comprendraient toujours.

    Bettie Page – Playboy janvier 1955

    Jayne Mansfield – Playboy février 1955

    La première ‘Bunny of the Year’ Gina Byrams, 1970

    Carol Eden – Playboy décembre 1960

     

     

     

     

  • Ruby Bridges : première enfant noire à intégrer une école blanche


    Certains enfants ont très tôt des destins auxquels ils ne sont sans doute pas préparés. Que pensait la petite Ruby Bridges, afro américaine, première enfant noire à intégrer une école pour enfants blancs, quand elle a franchi la porte de l’école William Frantz Elementary school en Louisiane ? Nous sommes le 14 novembre 1960. Voici son histoire.

    Ruby Bridges Hall est née le 8 septembre 1954 à Tylertown dans le Mississippi. A cette même date, un arrêt de la Cour suprême des États-Unis juge anticonstitutionnelle la ségrégation raciale dans les écoles publiques. Les habitants blancs de La Nouvelle-Orléans protestent violemment jusqu’à ce qu’un juge de la ville leur donne tort.

    La petite Ruby Bridges arrive à l’école

    La petite Ruby déménage avec ses parents à la Nouvelle-Orléans, en Louisiane, à l’âge de 6 ans, en 1960. Nous sommes en plein cœur du Deep South ségrégationniste. À cette date, ses parents répondent à l’appel du NAACP (Association nationale pour la promotion des gens de couleur) et acceptent que leur fille participe à l’intégration dans le nouveau système scolaire mis en place à La Nouvelle-Orléans. Elle devient alors la première enfant noire à fréquenter une école blanche. Ce jour-là trois autres enfants noirs  feront leur rentrée dans une école blanche.

    Protégée pour aller à l’école

    Mais les « blancs » ne sont pas tous disposés à intégrer les » noirs », elle a besoin de protection pour entrer à l’école. Les officiers de police locaux et de l’État refusant de la protéger (voir extrait vidéo en bas de page), elle est alors accompagnée par des “Marshall” fédéraux. La mère de Ruby se doute bien que des manifestants seraient positionnés près de l’école mais c’est une foule raciste qui les accueille. Plus tard, Ruby reviendra sur ce moment  « de la voiture, je pouvais voir la foule, mais puisque je vivais à La Nouvelle-Orléans, je croyais que c’était Mardi Gras. Il y avait une grande foule de personnes près de l’école. Elles lançaient des choses et me criaient dessus, mais ce genre de chose arrivait à La Nouvelle-Orléans au Mardi Gras ».

    Une famille persécutée

    Des manifestants s’opposent à l’arrivée des enfants noirs dans les écoles des blancs.

    Quand Ruby arrive à l’école, des parents blancs entrent aussi mais sortent leurs enfants de l’établissement. Tous les enseignants, à l’exception d’une professeur blanche, refusent de faire cours. Seule, Barbara Henry, originaire de Boston, au Massachusetts, accepte de faire cours à Ruby. « Tous les enfants blancs avaient été retirés par leurs parents. Ils n’admettaient pas que leur progéniture étudie en ma compagnie. Pendant un an, j’ai été l’unique élève de l’établissement. Mais la maîtresse a continué à faire cours pour moi seule. » Cette enseignante blanche est une héroïne. Elle se nomme Barbara Henry et vit aujourd’hui à Boston. « C’est grâce à elle que je ne vois pas les choses à travers le prisme de la race », explique-t-elle. Mais la famille de Ruby le paiera cash. Son père perd son emploi et ses grands-parents, agriculteurs du Mississippi, sont renvoyés de leurs terres.

    Un peintre de renom en hommage

    Tableau du peintre Norman Rockwell “The Problem We All Live With” – 1964

    Le peintre Norman Rockwell immortalise la scène en 1964 avec son tableau intitulée The Problem We All Live With (Le problème avec lequel nous vivons tous). Sa toile montre Ruby et ses gardes du corps longeant un mur sur lequel un simple mot a été tracé : nigger (nègre). Ce tableau sera exposé à la Maison Blanche à la demande d’ Obama en 2011.

    Ruby Bridges et le Président Obama en 2011

    Aujourd’hui Ruby Bridges Hall, vit toujours à La Nouvelle-Orléans. Elle est maintenant la porte-parole de la Ruby Bridges Foundation, fondée en 1999 pour promouvoir « les valeurs de la tolérance, du respect et de l’appréciation des différences ».

    Le 27 octobre 2006, la municipalité d’Alameda, en Californie ouvre une école élémentaire portant le nom de Ruby Bridges et fait une déclaration en son honneur. Ironie du sort à l’école primaire William-Frantz, il n’y a plus aujourd’hui que des enfants noirs.

    Ruby Bridges aujourd’hui


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